
Commerce International : Une importante réforme fiscale est entrée en vigueur en Chine au 1er janvier 2008. En quoi consiste-t-elle ? Quelles stratégies fiscales les entreprises peuvent-elles envisager face à ces nouvelles contraintes ?
Hélène Rives : « Cette réforme majeure était attendue depuis une décennie. L’objectif est de mettre sur un pied d’égalité les sociétés étrangères et chinoises. Les régimes préférentiels d’imposition des bénéfices sont abolis. Les sociétés à capitaux étrangers seront désormais soumises, comme les sociétés chinoises, à un taux d’imposition de 25 %. Jusqu’alors, elles bénéficiaient d’une exonération d’impôt les deux premières années de profits et d’un rabais de 50 % sur le taux d’imposition les trois années suivantes. Avec cet arsenal de mesures favorables, les sociétés étrangères payaient en moyenne un taux effectif d’imposition entre 12 % et 15 %. L’arrêt de ces régimes préférentiels est toutefois atténué par des mesures transitoires de cinq ans. À titre d’exemple, dans la zone de Pudong, à Shanghai, ville très attractive, le taux d’imposition, aujourd’hui de 15 %, augmentera de 2 % par an pour atteindre 25 % dans cinq ans. Par ailleurs, un autre changement pour les entreprises est la retenue à la source de 10 % des dividendes versés aux actionnaires étrangers. Pour la limiter, certains groupes réfléchissent à une nouvelle organisation qui consiste à installer des holdings à Hong Kong, les sociétés chinoises payant des dividendes à une société de Hong Kong ayant une retenue à la source de seulement 5 %. Autre stratégie mise en place : les sociétés financent au maximum leurs opérations avec de la dette, et non en capital, ce qui érode la base taxable et diminue leur imposition effective. »
C.I. : Cette réforme signifie-t-elle la fin de l’attractivité de la Chine pour les investisseurs étrangers ?
H. R. : « La Chine, 4e économie mondiale, dispose d’un marché local phénoménal.10 % de la population a un niveau de vie comparable à celui de l’Europe, avec de fortes habitudes de consommation. La Chine conserve donc des opportunités de business très importantes qui compenseront la baisse de l’attractivité fiscale,qui est toutefois à relativiser. Un taux d’imposition de 25 % demeure en effet inférieur aux taux pratiqués en Europe… »
Certains domaines d’activité vont cependant bénéficier d’incitations fiscales. Lesquelles et dans quel but politique pour la Chine ?
H. R. : « La réforme maintient et étend des taux favorables à certains secteurs dont celui des hautes technologies qui bénéficiera d’un taux à 15 % sur tout le territoire chinois, alors qu’auparavant les taux favorables étaient limités à des « zones économiques spéciales », comme Shenzhen, Hainan ou Pudong. Il y a donc une réelle volonté politique de développer la recherche en Chine et d’encourager les transferts de technologie opérés auprès des entreprises chinoises. La Chine ne veut plus être l’usine du monde mais souhaite devenir un géant de l’économie mondiale.Au-delà de l’aspect fiscal, le pays bénéficie d’un environnement économique favorable à la recherche grâce, notamment, à une main-d’œuvre dont la qualification ne cesse de progresser. »